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Le personnage Homme Taureau_Fondations du personnage

  • (février 2019) Comment représenter par un travail plastique et manuel (l’intervention du geste sous la caméra), comment exposer une détresse existentielle, comment représenter un chaos intérieur, une apparition ?
    Souvent , le surgissement d’un modèle humain que provoque la photo, ou le cinéma, se fait par hasard, par miracle, par la lumière.
  • Comment approcher cette intensité dans la représentation humaine, avec un travail tellement détaché de l’instant ?
    La peinture de L. Freud
    Comment la folie, non caricaturée et inquiétante, peut -elle être représentée de cette manière, en animant des éléments découpés ?
  • La folie.
    Si la folie est une et singulière, et sa manifestation sur nos corps et nos esprits définitivement identifiée… Et identifiable.
    Alors la folie apporte sans doute une fragilité supplémentaire dans l’expression que portent nos corps, et nos gestes.
    Une fragilité supplémentaire et multiple, polymorphe, insaisissable.
  • Il y a les fous qu’on ne détecte pas… Ceux dont les gestes sont maîtrisés, dissimulés.
    L’homme Taureau est de ceux-là, les fous qu’on ne détecte pas.
    L’homme Taureau est fou, mais trop tard. Il nous a déjà attachés.
    Voilà le fou parce que nous sommes attachés, immobilisés, à sa merci. Le fou qui nous tient (il est en nous).


  • (février 2019) Je ne sais pas s’il y a une dimension politique dans la représentation de l’homme Taureau. Il s’agit toujours pour commencer d’intuition et ensuite d’ultra-simplification du trajet de représentation. L’intuition survient parce que s’assemblent des faits (des choses vues, connues) et la perception claire d’un trajet (une apparition romanesque, la venue d’un héros de film).
    L’intuition est toujours plus importante que le reste, et la suite en dépend puisque je garde dans le long travail technique l’urgence de l’intuition pour permettre la représentation.
    Mais d’habitude, je suis rejoint par le fait politique et la représentation des personnages est contaminée par la représentation du fait politique (exercice et organisation du pouvoir).
    En quoi ce personnage serait-il lié au politique. Je ne vois pas, il est trop singulier. Il a surgi trop rapidement, et est vite devenu insaisissable (incontrôlable).
    Il y a peut-être la place excessive des spectateurs (plus excessive que dans le film Sexe Faible, où ils étaient coincés entre deux portes, en voyeurs indélicats).
  • J’affûte le dispositif autoritaire du cinéma pour rendre le spectateur encore plus présent au coeur du film (excessivement peut-être, alors…). L’homme Taureau perd en puissance politique et les spectateurs, à leur place de spectateur donnent, eux, le sens politique de la représentation…
    C’est là que je pense vouloir en venir. C’est une intuition, encore.

  • (mars 2019)L’homme Taureau projette une ombre, une menace. La tension et la peur. Son corps très présent dans les images avec une sensualité non érotisée, souvent en très gros plan, masque le véritable personnage du film. Un personnage menaçant et invisible et pourtant au premier plan dès le début du film.
    Peut-être que ce personnage est le principal acteur du film. Une ombre qui grandit et s’émancipe…
    Les ombres au début sont franches, nettes et obéissantes. Les feuillages sur la peau sont doux et caressants. Lentement, les ombres vont inquiéter, se disperser, affoler, et pour finir attaquer et détruire (punir?).
    Comme une menace qui s’unit, se multiplie et grandit, réunissant des forces invisibles et des non-dits.
    Dès le début cette menace est présente sur le sable, l’ombre du corps de l’homme est tranchante.


  • (mars 2019)Il y a une intimité entre le Golem et le personnage homme Taureau. Elle est naturelle, parce qu’elle n’est pas seulement dans la poétique narrative et la représentation du personnage, mais aussi dans le travail manuel et plastique qui fabrique le personnage animé.
    La prière relie le geste à l’image.
  • La prière est mise en abîme par l’artiste.
  • L’homme est animé, mais l’homme vient animer ses propres créatures rédemptrices, protectrices. Il enclenche la magie (prière).
    Entre survie et perdition, on ne sait pas si les poupées sont les instruments de son sacrifice, ou si elles sont des objets sacrifiés à sa réalisation.

  • (avril 2019)Les poses du personnage s’inspirent fortement des portraits en pied de L. Freud.
    De plus, introduire dans la seconde partie du film un corps à la peau usée, ajoutera sûrement à l’inconfort ressenti de voir un personnage sans pudeur érotisante, ni charme érotique. Je sais q’un inconfort sera ressenti.
    Pourtant ce corps est aimable. Oui.
    La production visuelle commerciale ne retient pas l’érotisme des peaux usées. Cette voie m’offre inconfort et malaise. Un territoire troublant.

  • (avril 2019)Je ne pensais pas aimer le personnage Homme Taureau. Par hasard. L’amour.Je l’ai repoussé.
    Il me faisait croire que c’était moi. Que c’était moi qui l’invitais. Que je voulais ça.
    Je l’expulse.

    Tu le sais, les visiteurs qui empruntent les rêves et les cauchemars sont des intrus. Mais ils ne viennent pas au hasard.
    Nous les appelons.

    J’ai appris, d’instinct (enfantin et magique) à ne jamais plus l’inviter. Il n’est plus venu.

    Mais je commence à l’aimer. A cause du modèle, de sa peau et de sa corpulence. Il prend corps… A cause du volume de son corps et de sa prestance assez douce. Les volumes du modèle sont souples et rassurants. Ils portent une gentillesse.

    Je vais perturber tout ça, je vais tordre tout ça.
    En rêve, tu sais.
    Je vais faire ça.
    On va se revoir.
    Tu vas voir.
    On se reverra.

    Mais lui, le corps qui pose, est très doux et très gentil. Il est loin de tout ça.


  • (mai 2019) Le monstrueux.
    Le monstre est un bien commun. Le monstre de littérature. Avant d’être le monstre du cinéma. « Frankenstein ».

    Les déportés.

    C’est un souvenir monstrueux. Vraiment monstrueux. Il m’a fait assoir sur ses cuisses.
    Il regardait « Nuit et brouillard ». J’ai vu le carré blanc en bas à droite. J’avais entendu parler des carrés blancs. C’était interdit de les regarder. C’était la première fois que j’en regardais un.
    Il y avait des tas de cadavres en noir et blanc, et ça me faisait penser à de la nourriture avariée.
    J’étais assis sur sa cuisse (comme nourriture). Il avait ouvert les jambes, pour l’accueil. J’étais coincé.
    Et je ne voulais pas qu’on m’aime (comme nourriture).


  • (juillet 2019) Pour qu’il fonctionne, le film HT devrait générer une forte énergie qui délivrera de violents électrochocs.
    Là, l’énergie sera punitive.
    Victor Frankenstein arrachait les cadavres au cycle de la nature (la mort et le pourrissement), j’espère arracher HT à la représentation cinématographique.
    Augmenter la quantité de courant, pour qu’il se libère, et nous échappe.
    Un Golem électrique.

  • (Octobre 2019) Pour la forme du personnage, je m’aide du travail de Lucian Freud et des corps représentés dans leur déséquilibre mental. Des corps représentés en juste équilibre.
    Pour le fond du personnage, l’homme Taureau est pris dans les toiles de Bacon. La violence de leur mutation, de leur révélation. Le sperme, partout lorsque le taureau pointe son museau sur la toile. Le sperme blanc et pur comme du « Tipp-ex ». Le taureau est sexe. Le taureau est sperme.
    Le sperme qui triomphe sur le corps des hommes défaits et vaincus. Le sperme éblouissant. Blanc.
  • (Octobre 2019) Le Golem électrique Homme Taureau est chargé de sperme. Il est secoué de sperme. Il illumine le film d’une lumière aveuglante, « Tipp-Ex ». Il est agité d’orages incontrôlables. C’est un Golem, conçu pour le combat et pour la mort. Son sperme est intarissable.